جامعة مستغانمCOLLOQUE INTERNATIONAL EDAF
Université de Mostaganem - Octobre 2011
Numéros Spéciaux de Resolang, Expressions et Synergies Algérie
La Littérature maghrébine face à la critique universitaire.
Essai de Bilan
« L’état des problématiques dans un espace intellectuel national constitue à la fois une base normale des recherches et un redoutable obstacle. Une base, car l’état de l’art doit être parfaitement connu pour ne pas (re)produire des naïvetés et des erreurs commises dans le passé. Un obstacle, car il constitue un labyrinthe avec des impasses qui ont été constituées par des générations de chercheurs comme des limites presque naturelles de la réflexion. Etre au fait de l’état dans un domaine c’est être intellectuellement armé, mais c’est aussi s’arrêter sur et devant les mêmes problèmes, être empêché de travailler par les mêmes raisonnements, les mêmes appréhensions, tout le monde vivant dans le même labyrinthe argumentatif et plus personne n’étant suffisamment naïf (ou fou) pour penser qu’il existe des solutions à certains problèmes. »
Bernard Lahire, Frantz Kafka. Eléments pour une théorie de la création littéraire, Paris, Editions La Découverte, 2010, p. 16.
Depuis un peu plus d’un demi-siècle la littérature maghrébine a fait l’objet de recherches universitaires dans les pays du Maghreb et dans le monde. La vitalité de cette recherche est un fait incontestable par le nombre de thèses et de mémoires soutenues, les ouvrages qui lui sont consacrés et les nombreuses manifestations : colloques, journées d’étude et forums qui lui sont dédiées. Il est évident qu’un examen systématique et exhaustif de cette masse critique ne peut guère être envisagé à l’occasion d’un colloque ou au travers d’une publication.
Cependant, de cet ensemble émergent incontestablement des figures phares de cette recherche critique qui, sur la longue durée, ont tracé des perspectives, ancré des problématiques et ouvert, pour un grand nombre de chercheurs universitaires, des chantiers qui ont fait l’objet d’investigations nombreuses et variées jusqu’à présent. Il ne s’agit pas de dresser un quelconque monument hagiographique pour des études qui ont été porteuses de lectures fortes et de questionnements sensibles fruits de leur époque. Mais bien plus heuristiquement de procéder à une re-lecture des parcours critiques d’œuvres majeures de cette critique universitaire en privilégiant essentiellement quelques noms qui, quelque soit l’intérêt actuel que peuvent avoir leurs travaux, ont balisé ce champ critique universitaire de la littérature maghrébine.
Pour limiter quelque peu le champ d’investigation, le principe est de retenir parmi les spécialistes universitaires, ceux qui, sur une période assez longue, ont pu produire des œuvres analytiques assez régulières pour formaliser un discours critique dont les configurations sont identifiables (mais qui ont pu aussi changer).
Il s’agira surtout à partir de leurs productions de prendre en compte les grandes tendances et d’examiner les enjeux essentiels dans une perspective comparatiste (et en diachronie) pour montrer ce qui se peut se présenter comme un simple reflet des discours en cours (méthodologies en vogue et/ou tendances idéologiques prégnantes) ou de signaler ce qui s’est peu à peu formalisé comme une sorte d’acquis analytique.
Deux axes fondateurs de cette critique universitaire méritent d’être évalués. Le premier est relatif à l’histoire littéraire proprement dite : la question de l’émergence d’une production littéraire relativement autonome et ses diverses caractérisations nationales, régionales voire linguistiques. Avec, comme développement incident, la production d’outils de classification et de périodisation. Le second axe, quant à lui, est plus lié à l’évaluation critique des œuvres et des auteurs. Il y aurait tout un travail de synthèse d’ensemble pour restituer les différentes contributions qui ont apporté des éclairages nouveaux sur une œuvre ou un auteur.
Des écrivains comme Driss Chraibi, Mohamed Dib, Kateb Yacine ou Assia Djebar doivent une part de leur postérité critique à différentes lectures novatrices et éclairantes dont ils ont fait l’objet. En d’autres termes, il s’agira de faire en quelque sorte le point sur ce qui s’est peu à peu cristallisé en savoirs institutionnalisés sur des œuvres et des auteurs en n’oubliant pas pour autant de mettre l’accent sur d’autres apports moins évidents et plus discrets.
Un troisième axe pourrait être ajouté comme une sorte de contrepoint analytique. C’est l’ensemble des ‘métatextes’ auctoriaux où les écrivains s’invitent à la critique de leurs pairs, problématisent leurs écritures, participent au débat littéraire ou s’autorisent d’un parrainage symbolique qui leur permet souvent de tracer une sorte de programme esthétique ou poétique par la bande.
On aura compris que, derrière de telles interrogations que nous souhaitons soulever au cours de ce colloque, il y a une part de réhabilitation des chercheurs qui ont contribué, par leurs activités scientifiques mais également par un engagement personnel auprès des écrivains, à faire exister cette production littéraire. Le regard réflexif des écrivains eux-mêmes, en variant la focale analytique, permet d’ouvrir l’investigation et d’offrir un contre discours qui ne peut qu’enrichir ce bilan critique. C’est en y apportant un regard neuf et attentif que ceux qui relaient tous ces auteurs universitaires aujourd’hui exprimeront le mieux leur dette intellectuelle.
Les Axes
Axe 1 : Les Auteurs
1. Les fondateurs: Autour des travaux d’Albert Memmi, Abdelkébir Khatibi, Jean Déjeux et Jean Fontaine.
2. L’institutionnalisation universitaire : entre histoire littéraire et parcours d’écrivains. Les recherches de Jacqueline Arnaud, Charles Bonn, Christiane Achour-Chaulet, Nadjet Khadda, Abdallah Mdarhi-Alaoui, Abderrahmane Tenkoul, Habib Salha, etc.
3. Des critiques et leurs auteurs. Cerner les lectures universitaires les plus éclairantes et les plus systématiques pour les écrivains maghrébins les plus emblématiques : Kateb Yacine; Mohamed Dib; Driss Chraibi ; Rachid Boudjedra; Mouloud Feraoun; Abdelkebir Khatibi; Assia Djebar; Malek Haddad; Albert Memmi ; Jean Sénac; Mohammed Kheir Eddine; Rachid Mimouni; Tahar Djaout ; Mouloud Mammeri; etc.
Axe 2 : Les Genres
Des synthèses, par genres ou thématiques critiques rendraient compte des problématiques théoriques et analytiques au cœur des approches critiques :
1. Les anthologies.
2. Les manuels.
3. Les genres littéraires proprement dits : roman, nouvelle, poésie, théâtre.
4. Les histoires littéraires.
5. Les biobibliographies.
Axe 3 : Les Métatextes Auctoriaux
Comment les écrivains disent leur présence au monde de l’écriture, comment se situent-ils par rapport à leurs pairs ? Quelles réceptions font-ils de leurs prédécesseurs, de leurs contemporains ? Au travers des questions que leur adresse le discours universitaire, quelles réponses donnent-ils des débats qui mobilisent l’instance critique : l’histoire littéraire, les notions de nationalité littéraire, d’engagement, etc.
Recommandations
Les propositions de communication doivent comporter un résumé, un plan provisoire et une dizaine de références bibliographiques (au maximum) utilisées dans le travail.
Le texte des communications acceptées devra être transmis quatre mois avant la tenue du colloque pour la publication des actes qui seront distribués à la clôture du colloque.
Calendrier
Juin 2010 : Appel à communication
Juillet 2010-janvier 2011 : sélection des propositions par le comité scientifique.
Février 2011 : courrier d’acceptation de la contribution.
Juin 2011 : envoi des contributions écrites.
Les propositions sont à adresser à : milihadj @ gmail.com
Comité scientifique : Kamel Abdou (Université de Constantine), Saddek Aouadi (Université de Annaba), Farida Boualit (Université de Béjaia), Yamilé Ghebalou (Université d’Alger), Hadj Miliani (Université de Mostaganem), Fewzia Sari (Université d’Oran).