Baya (1931- 1998) Artiste-peintre algérienne
Extraits de diverses biographies sur BAYA, Bonne lecture.
Baya (1931- 1998)2 Artiste-peintre algérienne Baya est née le 12 décembre 1931 à Bordj el Kiffan (Fort-de-l’Eau), aux environs d’Alger. Orpheline, elle est recueillie à l’âge de cinq ans par sa grand-mère qu’elle aide dans son travail dans une ferme de colons. En 1943, ses premières réalisations de modelages et de ses dessins attirent l’attention de Marguerite Caminat, soeur de la propriétaire du domaine. Elle la prend alors en charge et lui donnent les moyens de s’exprimer. Aimé Maeght, de passage à Alger, découvre fortuitement ses oeuvres chez son ami le sculpteur Jean Peyrissac et tombe sous le charme : Baya part en 1947 à l’âge de seize ans pour Paris à l’occasion de l’exposition de ses aquarelles au sein de la galerie Maeght. Ses tableaux provoquent un véritable engouement dans le tout-paris qui s’émerveillent pour sa naïveté picturale, son catalogue est même préfacé par André Breton. Lors de cette même exposition, le maître du surréalisme dira d’elle : « Je parle, non comme tant d’autres pour déplorer une fin mais pour promouvoir un début et sur ce début Baya est reine. Le début d’un âge d’émancipation et de concorde, en rupture radicale avec le précédent et dont un des principaux leviers soit pour l’homme l’imprégnation systématique, toujours plus grande, de la nature.(...) Baya dont la mission est de recharger de sens ces beaux mots nostalgiques :’l’Arabie heureuse’. Baya, qui tient et ranime le rameau d’or3. »
En février 1948, elle fait également la une du magazine de mode Vogue (édition française). Celle qui signe ses oeuvres de son seul prénom reste quelques années en France et côtoie ainsi Braque ou Picasso qu’elle rencontre en 1949 à Vallauris où elle réalise des sculptures en céramique à l’atelier Madoura. En 1953, elle se marie avec le musicien El Hadj Mahfoud Mahieddine et s’installe à Blida en Algérie :
c’est la fin d’une époque. Après une interruption de dix ans, elle reprend le chemin de son atelier grâce aux encouragements de Jean de Maisonseul, directeur du musée des Beaux-Arts d’Alger où elle expose en 1963, puis en 1964 à Paris. Dans les années 80 et 90, ses oeuvres sont présentées en France au Musée Cantini de Marseille en 1982,1988 et à Paris en 1984, 1987, et 1991.
Son oeuvre est composée de couleurs très vives et dominée par le rose indien et le bleu indigo. Ses aquarelles et ses gouaches mettent en scène la plupart du temps des paysages sous-terrains aquatiques, royaume de la faune et de la flore, (« Poissons dans les eaux 1966 »), 2 Biographie faite par Naïma Yahi 3 Breton André, « Baya », catalogue d’exposition, coll. « derrière le miroir », Edition Adrien Maeght, Paris, 1947.
Orpheline de ses deux parents, elle est recueillie par sa grand-mère qu’elle aide dans son travail dans une ferme de colons (horticulture). En 1943, Marguerite Caminat, sœur de la propriétaire, la prend chez elle à Alger pour rendre des services ménagers dans une maison dont l’éblouissent les fleurs et les oiseaux. Baya commence alors à modeler des personnages ou des animaux fantastiques en argile et elle est encouragée à réaliser des gouaches que le sculpteur Jean Peyrissac montre à Aimé Maeght, de passage à Alger en 1943.
En 1947, une exposition est organisée à Paris par Maeght dans sa galerie. André Breton préface le catalogue. Elle connaît un vif succès[1]. Le magazine "Vogue" publie la photo de Baya, qui n’a alors que seize ans, avec un article d’Edmonde Charles-Roux. Baya découvre Paris et rencontre le peintre Georges Braque. en 1949 elle réalise à Vallauris des sculptures en céramique dans l’atelier Madoura et côtoie Picasso. En 1953, Baya est "remis" à son tuteur, qui la marie, comme seconde épouse, au musicien "arabo-andalou" El Hadj Mahfoud Mahieddine, d’une trentaine d’années plus âgé qu’elle. « Passé le bal irréel de Cendrillon », comme l’écrit François Pouillon, Baya demeure durant dix ans dans l’impossibilité de poursuivre son travail. En 1963, le Musée d’Alger acquiert (gracieusement) et expose ses œuvres anciennes. Sur l’amicale incitation de Mireille et Jean de Maisonseul, conservateur du Musée, elle reprend ses pinceaux et ne cessera plus de réaliser sur papier de grandes œuvres qui seront par la suite régulièrement exposées en Algérie (Alger, Tizi Ouzou, Annaba), en France (Paris et Marseille), en Belgique (Bruxelles) et dans le monde arabe. Plusieurs d’entre elles sont conservées dans la collection d’art brut de Lausanne.
Baya est placée, avec Aksouh, Benanteur, Guermaz, Issiakhem, Khadda ou Mesli, parmi les artistes de la « génération de 1930 » (tous ces peintres étant nés autour de cette année) qui, après les précurseurs des années 1920, ont été les fondateurs de l’art algérien moderne.
Kateb Yacine
Rien dans la destinée comme dans l’œuvre de Baya qui ne relève d’une improbable féerie. Le contraste apparaît d’emblée magique entre sa frêle silhouette, sa modestie, et le flux puissant de son travail, la vigueur de ses tracés, l’intensité de ses couleurs. C’est sous le signe de la légende que naît sa création quand, « enfant sauvage », il lui est donné la possibilité de réaliser les étonnantes gouaches qu’elle anime de ses contes. « Si on peut imaginer des correspondances dans les thèmes de Baya avec ceux du plus ancien Orient par une transmission orale traditionnelle, qu’en est-il des analogies plastiques ? Cette enfant n’a jamais rien vu qui ait quelque rapport avec les formes et les couleurs de l’Egypte, de la Crète et de Sumer -comment a-t-elle retrouvé l’essence de l’arabesque ? » interroge Jean de Maisonseul. L’exposition de ses gouaches chez Maeght alors qu’elle n’a pas même seize ans demeure de l’ordre de la fable. C’est par une sorte de miracle, « un concours ultra favorable de circonstances » écrit Breton dans sa préface, qu’elle incarne les premiers pas d’un art algérien moderne dont les cheminements complémentaires ne se cristalliseront décisivement que durant la décennie suivante, à travers la peinture des précurseurs, tels Issiakhem et Khadda, tous nés comme elle autour de 1930. Mais sans doute est-ce le climat de ses œuvres qui recouvre de ce voile d’enchantement un parcours jalonné d’obstacles, embûches, malentendus et frustrations, depuis son enfance orpheline et la longue période pendant laquelle elle se trouve dans l’incapacité de peindre, tandis que se succèdent les années de guerre, jusqu’à sa disparition au milieu de la souffrance algérienne. Si l’artiste prête existence à ses œuvres, elles le lui rendent bien, lissant l’ombre et la douleur, lui composant la présence toute de lumière qui finit par devenir sa vraie vie. Climat en fait non pas donné, vécu, seulement traduit, mais bien davantage construit, gagné : cette féerie, c’est activement que l’invente Baya durant plus d’un demi-siècle dans l’exploration d’un langage si personnel et si aisément identifiable qu’on pourrait le croire immobile. Art naïf, a-t-on répété, en une formule qui risque de présenter l’artiste comme le jouet de son enfance ou le seul transcripteur des forces de son inconscient.