Les dynasties berbères
Les souverains almoravides sont issus d’un groupe de tribus berbères, les Sanhadja, nomadisant dans le Sahara, entre Sénégal, Niger et Sud marocain, et converties à l’islam à la fin du IXe siècle. À partir de 1048, Abdallah ibn Yasin, érudit musulman, fonde, à la demande du chef des Sanhadja, un couvent fortifié (ribat) au sein duquel les guerriers se préparant à la guerre sainte vivent dans le respect le plus strict des principes du sunnisme de rite malikite. En 1076, ces guerriers, connus sous le nom de « ceux de ribat » (al-murabitun en arabe, devenu almoravides), entreprennent la conquête du royaume du Ghana et du Maroc. Leur chef Yusuf ibn Tachfine, fondateur, vers 1060, de la ville de Marrakech, réalise, entre 1063 et 1082, l’unification du Maroc et de l’Ouest algérien. En 1086, il est appelé en Espagne par les princes musulmans des reyes de taifas, principautés indépendantes, que menacent les progrès de la reconquête chrétienne (Reconquista). Le 2 novembre 1086, Ibn Tachfine bat à Zallaka Alphonse VI d’Espagne, qui a enlevé Tolède aux musulmans l’année précédente. Entre 1090 et 1094, Ibn Tachfine rétablit l’unité de l’Espagne musulmane. Les souverains almoravides, se déclarant princes des musulmans, reconnaissent cependant le califat Abbasside de Bagdad. Champions d’un islam austère, ils protégent la culture de l’Andalousie musulmane et la diffusent même au Maghreb, où de monumentales constructions religieuses s’inspirent de l’architecture andalouse, notamment sous le règne d’Ali ibn Yusuf (1106-1142). Dès 1121, cependant, la puissance almoravide est déstabilisée par le soulèvement des Almohades, au Maroc. En 1147, ces derniers renversent les Almoravides, qui maintinrent toutefois un royaume aux Baléares, jusqu’en 1202.
Les Almohades (en arabe, al-Muwahhid, « qui proclame l’unité divine »), dynastie berbère musulmane, issue d’un mouvement de réforme religieuse, règnent sur le Maghreb et l’Espagne musulmane de 1147 à 1269. Le mouvement almohade est fondé, au début du XIIe siècle, par Muhammad ibn Tumart, un réformateur berbère de l’Anti-Atlas. S’opposant au rite malikite pratiqué par les Almoravides, Ibn Tumart prêche le retour aux sources religieuses de l’islam ; formé en Orient et influencé par le chiisme, il leur reproche d’avoir délaissé l’étude du Coran pour un juridisme excessif. Depuis les montagnes du Haut-Atlas, il organise une communauté militaire et religieuse autour d’un islam austère et rigide et, en 1121, se proclame mahdi (imam caché dont la venue est attendue par les chiites). Après la mort d’Ibn Tumart en 1130, un de ses disciples, Abd al-Mumin, lance la guerre sainte, ou jihad, contre le Maghreb almoravide. Tlemcen, Fès puis Marrakech sont prises et la dynastie régnante tombe en 1147. Abd al-Mumin (1130-1163) est désormais à la tête d’un empire englobant toute l’Afrique du Nord jusqu’à la Tripolitaine et l’Espagne méridionale par la prise de Cordoue en 1148 et de Grenade en 1154. Il se proclame calife, rejetant ainsi la suzeraineté des Abbassides et impose le principe d’une hérédité dynastique peu avant sa mort, ce qui permet à son fils, Abu Yaqub Yusuf (1163-1184), d’achever la conquête de l’Espagne musulmane. La puissance almohade commence à décliner après la bataille de Las Navas de Tolosa en 1212 lorsque les armées chrétiennes de Castille, d’Aragon et de Navarre défont le IVe calife, Muhammad al-Nasir (1199-1213). En 1236, Cordoue, la ville symbole de l’islam espagnol, se rend, tandis que les dissensions au sein du cercle dirigeant s’aggravent. Différentes provinces de l’empire se proclament indépendantes et des dynasties locales s’imposent, comme les Mérinides qui, en 1269, s’installent à Marrakech et établissent leur domination sur le Maroc. Cet émiettement de l’empire sonne le glas de la dynastie almohade. L’intransigeance religieuse des Almohades est à l’origine de persécutions contre les Juifs, convertis de force à l’islam, et contre la philosophie qui s’est épanouie sous les Almoravides. Maïmonide, célèbre philosophe juif, émigre en orient puis au Caire où il devient grand rabbin à la cours de Saladin 1er. Rapidement, cependant, les successeurs du mahdi goûtent au luxe de l’Andalousie et la cour almohade renoue avec la tradition intellectuelle et artistique de l’Espagne musulmane. Le philosophe Averroès est ainsi accueilli à la cour d’Abu Yaqub Yusuf. Les Almohades développent une architecture sobre et majestueuse, dont témoignent le minaret de la mosquée Koutoubia, à Marrakech, et la Giralda à Séville.