Sidi M’hamed ben Sidi Abderrahmane ben Salem

Notre saga continue pour énumérer et citer les principaux personnages qui ont fait l’histoire de notre vaste région de ‘’ber Sidi Nail’’, grand oiseau qui étend ses ailes d’est en ouest. Des Zibane aux M’zab et au delà. Des hommes qui ont marqué leur temps et qui appartiennent à la plus importante confédération de tribus du monde Arabe, et qui de ce fait, a subit les pires agressions de la part du colonialisme et ses dévots. Ber Sidi Nail a été le rempart contre l’apostat, contre la déculturation, contre l’aliénation et il a été le réservoir de sang pur, pour toutes les insurrections contre les envahisseurs de notre pays et un bastion révolutionnaire, n’en déplaise aux rétrogrades et aux égocentristes…
Un certain nombre des descendants de Sidi Nail ont joui du don de la baraka, et, chose extraordinaire, cette précieuse faculté s’est surtout perpétuée dans la descendance de Sidi M’hamed, l’enfant unique que Lala Dalale des ouled Arrif donna à son saint époux Sidi Abderrahmane ben Salem ben Melik. Nous citerons, parmi ceux de ces saints qui sont arrivés à la célébrité, Sidi Abd-er-Rahman ben Salem, son fils, Sidi M’hamed ben Abderrahman, et Sidi Thameur ben M’hamed. La légende ne nous a conservé le souvenir de ‘’karamat’’ opérées par le dernier de ces saints Ouali.
M’HAMED BEN SIDI ABDERRAHMANE
La cause des guerres incessantes entre différentes tribus était la possession de la Sebkha Zarhez et des plantureuses prairies qui entourent ce lac salé. Il faut dire aussi que le monopole de la fourniture du sel aux tribus sahariennes présentait un avantage qui n’était point à dédaigner. Pendant de longues années, ces richesses mirent les armes à la main aux tribus zarhéziennes. Les Oulad Naïl attendirent le moment opportun pour faire valoir leurs prétentions ; ils ne doutaient pas que ces luttes acharnées entre les populations ne finissent par les user, les épuiser, et les mettre, à un moment qui ne pouvait plus guère se faire attendre, hors d’état de leur opposer une résistance sérieuse. Malgré ce que ce calcul pouvait avoir de stratégique, Il n’en dénotait pas moins, de la part des Oulad-Naïl, une certaine habileté politique grâce à leurs chefs. En fin de compte, ils avaient réussi à avoir raison de leurs adversaires zarhéziens et à les expulser de la Sebkha. Un incident, fit tomber cette riche proie entre les mains des Ouled-Naïl. Sidi Mohammed ben Alia, marabout vénéré, demandant en mariage la fille d’un riche propriétaire de troupeaux de La montagne vit sa demande rejetée avec hauteur, Sidi Mohammed, on le comprend, fut sensiblement froissé de ce grossier manque d’égards à son endroit ; aussi résolut-il de se venger et de vendre le Zarhez aux Oulad Sidi Naïl, moyennant quarante brebis, un chameau, deux sacs de blé, quarante chachia, quarante aiguilles et deux gheraïr. C’était pour rien… Sidï M’hamed ben Sidi Abderrahman fut un héros dont les prouesses rappellent les temps chevaleresques ou antéislamiques, et la tradition lui attribue les actions les plus témérairement surprenantes ; quelques-uns de ses exploits rentrent aussi dans le domaine des faits surnaturels. Sidi M’hamed était un grand stratège en plus de sa piété. Il restait des journées entières en prières sur une colline dominant le Zarhez. Ce prodige fit grand bruit dans le pays et bien au delà, et les tribus ne s’avisèrent plus de provoquer un Ouali du Dieu unique. Ce furent les Rahman, les Bou-Aïch, les Zenakhra et les Mouïadat qui essayèrent de disputer à Sidi Mahammed l’une des parties les plus fertiles du Zarhez, à Korirech, c’est-à-dire sur le terrain même qu’elles convoitaient, entre la Sebkha occidentale et l’Aïn-El-Bsiça. Les cavaliers des goums adverses étaient aussi nombreux, d’après la tradition, que les étoiles du ciel et la plaine, sur une étendue que ne saurait embrasser le regard, était couverte de leurs contingents. Le succès des tribus confédérées paraissait assuré : car c’est à peine si toutes les tribus réunies des Oulad-Naïl, du moins celles qui avaient leurs campements à proximité du Zarhez, auraient pu mettre sur pied un pareil nombre de cavaliers ; et puis, d’ailleurs, cette incursion des tribus du nord de la sebkha était une surprise que rien n’avait pu faire prévoir, puisqu’on était sinon en pleine paix, tout au moins en pleine trêve des deux côtés. En présence d’une invasion aussi formidable qu’elle était imprévue, les tribus des Oulad-Naïl ne pouvaient songer à la résistance, et elles s’apprêtaient déjà à s’enfoncer dans le Sahara, lorsque Sidi M’hamed, suivi de dix guerriers de la Nezla el-Fahla (fraction des Preux), de Si Ahmed et d’El-Ghouini. (Ils appartenaient à l’une de ces fractions militantes qui fournirent une si longue suite de héros, parmi lesquels on citait déjà de son temps Hoceïn et Abd-es-Selam qui sont les deux fils d’El-ghouini ); apparurent tout à coup au milieu des tribus, qui décampaient en désordre, et leur ordonna d’aller rejoindre leurs emplacements. Malgré la réputation d’héroïsme des Preux qui suivaient Sidi M’hamed, les Oulad-Naïl ne purent s’empêcher de penser qu’il pouvait y avoir quelque témérité de leur part à marcher à la rencontre d’un pareil nombre d’ennemis mais c’étais sans compter du génie de leur chef. Sidi M’hamed et ses dix compagnons piquèrent droit sur le djebel Ouâchba, et escaladèrent la pointe nord de cette montagne, qui dominait toute l’armée adverse. laquelle avait pris un ordre de bataille d’autant plus vicieux que, dans le cas d’une retraite, que, sans doute, elle n’avait pas prévue, elle courait le risque d’être jetée dans le Zarhez, auquel elle s’était aussi maladroitement qu’imprudemment adossée ; or, il est extrêmement dangereux de traverser la Sebkha, surtout pendant la nuit, car on y a vu des cavaliers disparaître presque instantanément, eux et leurs bêtes. Il s’y trouve la source d’eau douce qu’on rencontre sur l’îlot du Mactaa El Djedian. Sidi M’hamed, qui était de première force en tactique militaire, comprit de suite le parti qu’il pouvait tirer de cette disposition vicieuse de ses ennemis pour rendre leur défaite plus complète. Il attendit donc le coucher du soleil pour opérer. Non sans une certaine appréhension, les coalisés allaient s’attaquer à Sidi M’hamed et à la terrible fraction des Preux. Mais, nous le répétons, ils espéraient surprendre les Oulad Naïl et, la razzia opérée, rejoindre rapidement leurs campements mais ce fut tout autrement que les choses se passèrent. Sidi Mohammed portait toujours en bandoulière, et sans son fourreau, un sabre d’une forme particulière, qui, déjà, s’était abreuvé jusqu’à l’ivresse du sang de ses ennemis ; ce sabre, exactement semblable à celui que le Prophète Mohamed que le salut soit sur lui, nommait dhou el fikar, et qui, à sa mort, passa à Sidi Ali (karama allah wajhou) , était à deux lames divergentes vers la pointe. On prétendait bien que c’était le sabre même du Prophète, et un grand nombre de ses partisans n’en doutaient pas, bien que cette noble origine de son arme manquât pourtant d’authenticité. Quoi qu’il en soit, quand, dans une affaire de sang, le saint guerrier mettait le sabre à la main pour se lancer dans la mêlée, l’ennemi était frappé subitement d’épouvante et prenait honteusement la fuite. Maintes fois, on en avait vu des exemples. : Sidi M’hamed était donc là, et avec des forces supérieures aux leurs peut-être, les guerriers de la fraction des Preux, dont chaque coup de sabre partageait un homme en deux, allaient inévitablement fondre sur eux avec la violence d’une trombe poussée par le guebli, cet irrésistible vent du désert, et les disperser comme il le fait des grains de sable des dunes. Ajoutez à cette effroyable perspective la puissance d’un ami de Dieu ayant à sa disposition la « baraka », que, sans doute, il allait liguer contre eux… Ce fut la victoire pour les uns et la débâcle pour les autres.
Les échos du Zarhez répétèrent pendant sept jours les malédictions du saint. « Si, ajoute le narrateur, par une nuit claire vous mettez l’oreille à terre sur la rive sud de la Sebkha Zarhez, vous entendez encore le tintement des chabir, sortes d’éperons de 15 cm, contre les étriers, et les imprécations des cavaliers contre leur vainqueur. Plusieurs fois, les descendants de l’ouali eurent raison des Turcs, qui voulaient exiger des Oulad sidi Naïl le payement d’une capitation annuelle, imposition à laquelle ils refusaient obstinément de se soumettre. Les Turcs, renforcés par les tribus makhzen ou auxiliaires, venaient poser leur camp sur le Zarhez, résolus de demander à la force ce qu’ils ne pouvaient obtenir autrement. Les colonnes turques étaient formidables et vigoureusement composées. Les Ouled Si M’hamed étaient loin de pouvoir mettre en ligne des forces suffisantes pour pouvoir lutter avantageusement contre les maîtres du Tell ; mais, heureusement, leur répertoire de stratagèmes était loin d’être épuisé, et puis, en cas d’insuccès, il leur restait toujours le recours à l’aide puissante du Dieu unique. Selon l’habitude, ils opèrent à la nuit close ou à l’afjar c'est-à-dire à l’aube. Ainsi donc ils tuèrent deux beys, l’un, Osman, par les ouled si Ahmed et l’autre, Softa, par le Ghouini, Attia ben Ahmed ben Ghouini qui lui enleva sa cote de maille, Attia, que les femmes chantent jusqu’à maintenant. Ou alors Abdelkader ben Dia que les chantres glorifient encore, et Belgacem ben Raach que les murs d’Alger pleurent encore. Ouled Si M’hamed eurent plusieurs fois les armes heureuses contre les turcs. Quelques-uns des nombreux descendants de Sidi Naïl signalèrent leur passage sur la terre par des ‘’karamate’’ ou par des actes d’héroïsme rappelant l’époque des chevaliers. Citer tous les exploits des saints et des guerriers de cette descendance nous entraînerait trop loin. Nous nous bornerons, pour évoquer la légende des saints des Ouled Sidi Nail, à rappeler quelques traits de la vie de Sidi Thameur, qui était un des fils de Sidi M’hamed ben Sidi Abderrahman.
Sidi Thameur, qui naquit de la troisième femme de Sidi M’hamed ben Sidi Abderrahman, Oumm-Hani, et qui fut le fondateur de la tribu de ce nom, s’illustra par de nombreux actes de dévouement, et par une piété transcendante qui lui valut le don des karamates; Sidi Thameur fut un des saints les plus populaires des Oulad-Naïl. L’esprit rebelle des Oulad-Naïl, joint à leur besoin de s’étendre, ne les disposait que trop à chercher, par des escarmouches continuelles, à lasser la patience des tribus qui les avoisinaient, et à les amener à prendre les armes pour tâcher d’en finir avec leurs turbulents voisins. A cet effet, toutes les tribus qui avaient eu plus ou moins à souffrir des incursions des Oulad-Naïl sur leur territoire firent alliance entre elles, et leur déclarèrent la guerre. N’ayant pas prévu cette redoutable coalition, et ne se sentant pas assez forts pour lui tenir tête, les Oulad-Naïl se retirèrent devant leurs adversaires, non sans se promettre toutefois de prendre leur revanche dès que les circonstances le leur permettraient. Pour se mettre plus promptement à l’abri de l’ardente poursuite des tribus confédérées, les Oulad-Naïl se dirigèrent vers le djebel Bou-Kahil, véritable labyrinthe hérissé d’obstacles de toute nature.
Sidi Thameur, avec l’aide de quelques-uns des Preux de sa tribu, défendit le miraculeux défilé le temps qu’il avait jugé nécessaire pour mettre les Oulad-Naïl hors des atteintes de l’ennemi. Malheureusement, il paya de sa vie son héroïque dévouement. Il est hors de doute que son heure était arrivée, et que Dieu l’avait voulu pour lui faire la faveur de lui donner la mort des martyrs. Il va sans dire que les Oulad-Naïl ne tardèrent pas à se reconstituer, et que, bientôt ils purent s’étendre dans tout le Sahara sur les territoires qu’ils occupent encore aujourd’hui…
(*) Chouiha Abderrahmane ; fondation Sidi Nail.
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s’accordent à rapporter que l’opposition à l’expédition turque s’était concrétisée par 2 embuscades exécutées exclusivement par les ouleds Si Ahmed et le nommé Attia n’a pas à notre connaissance était cité. La première embuscade a eu lieu en 1764 ou après les pertes subies par les Turcs le Bey Othman(Osman) fit pris par les ouled Si Ahmed qui lui tranchèrent la tête et à partir de cette date une colline au sud du Zahrèz porte le nom de Koudiat el-Bey .La 2ème embuscade,celle de 1773 ou le bey Softa tenta une autre expédition qui ne fut pas plus heureuse ; le bey s’engagea a la tête de son goum au milieu des tentes sans défense apparente et c’étaient les cavaliers des ouleds Si Ahmed camouflés et embusqués qui attaqueront au moment propice l’arrière garde de la méhalla turque dont ils firent un grand carnage ; le nom de Softa resta gravé dans la mémoire populaire par ces vers : ‘’oh Softa visage d’enfer……. ياصفطة يا وجه النار(in revue Africaine) et fut au nombre des morts.
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